samedi 2 septembre 2006

si vite...

C’est un vieux souvenir, mais il y a tant de choses qui changent qu’il semble temps de le ressortir.

Au printemps, le calme du soir, le jour se couche tendrement, le ciel a la douceur de ma couette, peut-être un souffle d’air dans le jardin – s’allonger dans l’herbe, les bras en croix, sentir la terre dans son dos, les brins d’herbe chatouillent mes jambes et mes joues et du sol s’élève une odeur fraîche, vivifiante, imprégnée de la chaleur du soleil, de l’ombre des pierres et du corps chaud du chat assoupi.

La Lune est peut-être levée à droite de la petite maison, le jardin est plongé dans l’ombre du soir, bleutée, mon chêne, le chêne bicentenaire qui a abrité mon enfance, contre lequel je m’asseyais pour lire et qui soutenait mes vélos, là où le chat plantait ses griffes et où je regardais monter les fourmis dans les sillons bizarres de l’écorce, le chêne dont je ramassais les glands pour nourrir les enfants perdus que nous étions, derrière lequel on se cachait quand on jouait avec l’arrosage automatique, le chêne qui a abrité mon enfance allongeait au-dessus de moi ses longues branches, ses minuscules feuilles qui dansaient dans le vent et dans lesquelles la lumière du soleil chantait.

Allongée dans l’herbe, je contemplais le scintillement des feuilles, jaune d’or, vert pomme, vert crème fraîche, vert foncé parfois, dans un ballet de lumières…

Les yeux perdus dans les couleurs, émue par ce spectacle, je songeais doucement que c’était terminé, fini, envolé. On partait, certes, on déménageait, et je me rendais compte à quel point j’étais attaché à cette maison et puis, tout changeait, les Riché allaient à Washington, une ville dont je ne connaissais pas même le nom, Karla filait à Orléans quand je pensais me rapprocher d’elle, mais cela …

Là, à ce moment, j’ai senti que l’enfance me glissait des doigts, restait dans cette grande et belle maison, dans le mur que j’escaladais, le cage d’escalier où on se cachait, dans la petite table et dans le vélo déglingué avec lequel on faisait des cascades, dans le grenier où on jouait à la maman et dans le salon où je dansais le dimanche sur la musique de papa. Mon enfance me glissait des doigts, restait dans le tas de fumier et dans Maman discutant sur les marches en fumant, dans le vert tendre du bambou et dans les feuilles mortes qu’on ramassait à l’automne, en râlant.

Je me rappelle l’odeur de l’herbe, les larmes aux yeux, l’enfance qui dévalait, comprendre que c’était fini, réaliser à demi mot que je ne reviendrai jamais dans la grande maison de fontenays, je me rappelle aussi que je ne voulais pas l’oublier, ce moment.

1 commentaire:

KhâlmarTsum a dit…

vert crême fraîche ö.Ô?

...Lise, on t'a déjà expliqué qu'il fallait pas garder ta crême fraîche plus de deux mois au frigo après ouverture du pot...